A l’occasion de la réédition du livre consacré à la Chartreuse,  » Chatreuse : guide de l’amateur de liqueur « , nous passons en revue le secret de cette recette centenaire.

Ils sont deux à connaitre le secret de « l’élixir de longue vie », reclus derrière les hauts murs du monastère de la Grande Chartreuse, en Isère. Le père Dom Benoit et le Frère Jean-Jacques sont les seuls à ce jour à pouvoir décompter les 130 plantes et épices qui entrent dans la composition de la fameuse liqueur. Depuis plus de quatre cents ans, depuis qu’en 1605 le maréchal d’Estrée a remis aux pères chartreux de Paris un manuscrit. Ce dernier, détaillant la formule de cette boisson au bouquet puissant et subtil, il en est ainsi. Le secret, de siècle en siècle, est partagé par  quelques initiés. Et le manuscrit, sous forme de parchemin, est conservé dans un coffre dont seul le supérieur de l’abbaye possède la clé.

Comment distingue-t-on les élus ? « Le plus simplement du monde. » explique Philip Boyer. Il assure la communication de Chartreuse Diffusion, la société commercialisant la production du monastère. « A un moment, tel ou tel moine qui manifeste un intérêt pour le travail des plantes, se voit invité à une patiente initiation. Souvent en aidant sur place, au monastère, dans la salle où sont conservées les herbes. »

L’âge et l’expérience ont ici toute leur importance : le père Dom Benoit a 70 ans et le frère Jean-Jacques 60 ans. Comme le précise Philip Boyer, «  les élus doivent démontrer la stabilité de leur vocation spirituelle. Un moine ne pourra se consacrer à la distillation que dans la mesure où il est parfaitement équilibré et serein dans sa vocation de chartreux. Ce n’est donc pas un novice, ni même un tout jeune moine qui peut être initié. »

Quand ils ne prient pas, le père Benoit et le frère Jean-Jacques passent le plus clair de leur temps entre la salle de stockage, le laboratoire où sont effectués les dosages, et la distillerie. Ils veillent en permanence sur toutes les étapes de la fabrication. Et rien ne les convainquerait de rompre leur serment. Leur silence vaut de l’or. « Mesurez que le président de la société de commercialisation des liqueurs, Chartreuse Diffusion, signe en aveugle des factures de plantes dont il ignore tout ! s’exclame Philip Boyer. « Il est certainement le seul PDG achetant des matières premières qu’il ne connait pas ! Extraordinaire non ? Au-delà de l’anecdote, cela souligne et témoigne de l’authenticité de cette société qui travaille pour que vive un ordre religieux. Dans une entente parfaitement ordonnée à une finalité plus grande que le strict but commercial. »

La recette a légèrement  évolué avec le temps. Elle a mis du temps à se fixer définitivement. Ce n’est qu’en 1764 que les chartreux ont obtenu, sur la base de la recette initiale, retravaillée, affinée, la première Chartreuse Verte. Elle titre à 55° d’alcool. En 1838, ils ont réalisé une liqueur plus douce : la Chartreuse Jaune, qui titre à 40°.

Dorénavant, 1,5 million de bouteilles sortent chaque année de la distillerie de Voiron. Deux autres millions de litres sont mis en vieillissement chaque année. La cave à liqueurs passe pour la plus grande du monde. Elle se visite et mérite le détour. On y découvre un spectaculaire chai de vieillissement qui fait 164 mètres de long. Un record paraît-il. Les chartreux, décidément, n’ont pas fini de nous étonner. N.W

 

Chartreuse Diffusion, 10, boulevard Edgar-Kofler, 38503 Voiron. Rens

04 76 05 81 77 / www.chartreuse.fr

Visite des caves : De 9 heures à 11 h 30 et de 14 heures à 18 h 30. (Ouvert également les samedis, dimanches et jours fériés).

Musée de la Grande-Chartreuse, La Correrie, 38380 Saint-Pierre-de-Chartreuse. Rens: 04 76 88 60 45/ www.musee-grande-chartreuse.fr. De juin à septembre, de 9 h 30 à 18 h 30.

 

Glénat, 2019

 

Ne buvez pas au volant. Consommez avec modération.

 

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